Pour permettre aux massifs forestiers de la capitale de s'adapter au changement climatique, les chercheurs du LIST étudient scientifiquement son impact sur les arbres, le carbone et la qualité de l'eau.
Source : Le Quotidien
Publication date : 04/04/2025
Les forêts de la capitale luxembourgeoise recouvrent 1 055 hectares, soit 20 % du territoire communal. Situées au nord de la Ville, au Bambësch, le plus grand massif forestier, et au sud avec les forêts de Hamm, Cessange, Kockelscheuer, Tawioun et Birelergronn, les forêts de la Ville de Luxembourg constituent un véritable apport écologique. Elles permettent l'humidification et le refroidissement de l'air, la filtration des polluants atmosphériques, la séquestration de carbone, la préservation de la qualité de l'eau des sources et la conservation de la biodiversité. Et grâce aux 100 kilomètres de chemins pédestres, elles apportent également une valeur récréative, ludique et éducative aux citoyens.
Malheureusement, et ce n'est plus un secret pour personne, la forêt souffre du réchauffement climatique. «C'est un constat inévitable: à Luxembourg aussi, la forêt est mal en point», constate Maurice Bauer, premier échevin de la Ville. D'autant plus que les forêts luxembourgeoises sont composées en grande majorité de hêtraies et de chênaies, des essences très vulnérables aux pressions du changement climatique. Si bien que 60 % des hêtres présentent déjà des séquelles liées aux sécheresses, alors que les projections prédisent une augmentation de l'intensité, de la durée et de la fréquence de ces épisodes secs dans les années à venir. «Les monocultures d'épicéas posent également problème. Lorsqu'ils meurent, des terrains entiers se retrouvent déboisés», ajoute Christophe Hissler, chercheur au LIST et responsable du projet Forlux.
Analyser le sol et les zones aériennes
Il est donc plus que primordial d'agir pour éviter que le changement climatique fasse trop de dégâts. «Pour aider la forêt à se refaire une santé, la Ville a élaboré une feuille de route avec cinq priorités déclinées en cinq projets», explique l'échevin. La Ville veut ainsi lutter contre les effets du changement climatique, favoriser une gestion durable des forêts, planter des arbres et s'adapter aux nouveaux défis liés au changement climatique, optimiser davantage l'exploitation locale du bois et promouvoir une forêt urbaine attractive et multifonctionnelle. «Nous avons déjà lancé les projets de la pépinière forestière et d'une nouvelle forêt de deuxhectares, et nous avons aussi créé un circuit pédagogique pour faire découvrir aux enfants l'univers de la forêt.»
Pour planter des arbres et s'adapter aux nouveaux défis liés au changement climatique, la Ville participe au projet Forlux du LIST. «C'est une plateforme qui va faciliter les échanges de données vers les gestionnaires et les citoyens», résume son responsable, Christophe Hissler. Les objectifs du projet sont de quantifier et d'anticiper la réponse des forêts au changement climatique, de développer des stratégies d'adaptation de la gestion des forêts et de sensibiliser et impliquer les citoyens dans la préservation des forêts.
Via une approche interdisciplinaire, les chercheurs de Forlux visent à récolter des données au sein même des forêts. Et comme elles ne sont pas que de simples «successions d'arbres», mais des «systèmes complexes», l'analyse doit se faire de façon très complète : «C'est important d'analyser conjointement ce qui se passe dans le sol et ce qui se passe dans les zones aériennes», appuie le chercheur.
Durant les deux années de construction du projet, un premier dispositif d'observation entièrement opérationnel a été installé sur le plateau du Bambësch. Une station étudie la manière dont la forêt stocke l'eau et la redistribue, l'autre analyse la façon dont est récupérée l'eau de pluie qui tombe sur les feuilles. «Cette première approche nous a permis de réaliser une carte à l'échelle de la forêt et de tirer des premiers résultats. Cela nous donne plein de perspectives pour le futur», souligne Christophe Hissler.
Au fur et à mesure, d'autres observatoires seront installés et dotés de capteurs permettant de récolter des données relatives à la santé des arbres, aux conditions météorologiques ainsi qu'à la qualité de l'air, à la quantité de l'eau infiltrée et du carbone stocké dans les arbres et dans le sol. «Au bout des cinq ans du projet, l'objectif est de présenter aux gestionnaires des modélisations des essences les mieux adaptées au défi climatique.»
Camille Vari