À travers le Grand dossier Layman, le Luxembourg institute of science and technology (LIST) vulgarise une vingtaine de projets de recherche ayant un impact direct sur le Grand-Duché et ses résidents.
Source : virgule.lu
Date de publication : 12/10/2024
Si vous avez fait trempette dans les eaux luxembourgeoises cet été, vous n’avez sûrement pas été indifférent au problème des cyanobactéries. Ces dernières ont pullulé en certains endroits, rendant l’eau impropre à la baignade. Ces interdictions ont été prononcées grâce aux analyses menées par le Luxembourg institute of science and technology (LIST), mais ont été rendues possibles grâce aux citoyens engagés dans la surveillance de la qualité de l’eau.
Grâce à un site internet ou une application, les résidents fournissent de précieux indices aux scientifiques quant à l’état de développement des cyanobactéries sur les lieux de baignade. Baptisée «Cyanowatch», cette initiative de science participative n’est que l’un nombreux projets mis en avant dans le Grand dossier Layman, publié début octobre par le LIST. Ce rapport d’une quarantaine de pages met en avant les recherches environnementales menées depuis près de dix ans par les chercheurs, en collaboration avec le ministère de l’Environnement.
Trouver l’équilibre entre exactitude et vulgarisation
«Nous conduisons de nombreux projets de recherche appliquée qui ont vraiment pour but d’avoir un impact direct sur l’environnement, les citoyens, mais aussi les acteurs économiques du Luxembourg. L’idée derrière cette publication était de mettre par écrit ces activités, et de tenter de les traduire en un contenu compréhensibles pour le grand public», explique le Dr. Arno Biwer, chef du Groupe Environmental Policies du LIST, qui a supervisé ce projet
Au total, il aura fallu environ un an aux chercheurs pour créer ce document consignant des années de recherches. Si certains sujets étaient davantage aisés à vulgariser, d’autres ont demandé plus de travail. «Lorsque nous diffusons des résultats scientifiques, il est important de trouver un bon équilibre entre l’exactitude scientifique et la vulgarisation des résultats», souligne Arno Biwer.
Malgré cette inévitable étape de la vulgarisation, l’initiateur du projet ne cache pas l’enthousiasme qu’a généré cette publication parmi les chercheurs. «Les fake news sont de plus en plus présentes dans notre quotidien. À travers ce rapport, nos experts souhaitaient partager avec les citoyens luxembourgeois le fruit de leur recherche, mais aussi et surtout l’intérêt de ces travaux pour tout un chacun.»
Un impact concret
S’ils peuvent d’emblée paraître totalement différents, la vingtaine de projets sélectionnés dans le cadre de ce rapport ont tous un point commun: ils font partie de l’accord-cadre liant le LIST au ministère de l’Environnement. «Il s’agit de projets qui sont toujours en cours aujourd’hui, sur lesquels nous allons continuer à travailler ensemble, qu’il s’agisse de la qualité de l’air ou de la surveillance des pollinisateurs au Luxembourg», indique Arno Biwer.
Au-delà de fournir un état des lieux de l’environnement au Luxembourg, les projets des chercheurs du LIST conduisent aussi à des applications concrètes. C’est le cas notamment dans la gestion des déchets du secteur de la construction. «Nous avons développé un guide pour aider les entreprises à mener leurs projets de déconstruction dans le respect des législations européennes et nationales, qui requièrent un recyclage des matériaux, et donc un inventaire de ces derniers. Nous rassemblons les acteurs du secteur et nous les accompagnons pour leur permettre de s’adapter aux bonnes pratiques», détaille Arno Biwer.
Les recherches du LIST ont également eu leur effet dans le domaine de l’industrie. Les chercheurs ont notamment accompagné les entreprises dans le but de les aider à implémenter la législation européenne concernant les produits chimiques. «En aidant les entreprises à connaître leurs obligations et à les remplir, nous avons un impact indirect sur les citoyens et l’environnement», poursuit le chercheur.
Apporter de l’espoir
Si la surveillance des cyanobactéries est sûrement l’initiative de science citoyenne la plus emblématique du LIST, d’autres projets reposent également sur la participation des résidents. Dans le cadre de la surveillance de la biodiversité, plusieurs projets sont menés pour surveiller les pollinisateurs, et impliquent des volontaires. «Le projet Citipol, par exemple, a pour ambition d’impliquer les citoyens volontaires dans le programme de suivi des pollinisateurs au Luxembourg mené par nos chercheurs. Pour ce faire, il est notamment prévu de développer des formations pratiques et théoriques sur le sujet. Leur participation est particulièrement précieuse car elle permet de collecter des données», détaille Arno Biwer.
En surveillant 30 espèces protégées au cours de cette dernière décennie, le LIST a pu identifier des tendances alarmantes comme la diminution de 39% de la reproduction de la grenouille commune, ou l’état particulièrement préoccupant de la population de certaines espèces d’amphibiens et de libellules. Grâce à cette collecte de données, les chercheurs produisent des indicateurs, des rapports et des études qui permettent d’établir des politiques environnementales nationales.
Entre réchauffement climatique et déclin de la biodiversité, les actualités entourant la thématique de l’environnement peuvent rapidement devenir pesantes. Mais Arno Biwer se veut optimiste. «Les défis sont là, mais nos recherches apportent de l’espoir. Le message est que nous pouvons agir et améliorer les choses. Si je regarde du côté de la qualité de l’eau, la situation semble plus optimiste. Quant aux produits chimiques, nous avons désormais interdit une longue liste de substances dangereuses. Il y a eu des améliorations pour la vie des gens et de l’environnement», appuie le chercheur.
Pour chacun des projets consignés dans ce grand dossier, le List a déjà un regard vers l’avenir. Poursuivre et étendre la surveillance des espères menacées, installation de nouveaux dispositifs de surveillance des cyanobactéries, ou encore amélioration de la détection des espèces exotiques envahissantes, les chercheurs ont déjà anticipé les prochains axes que prendront leurs recherches. «Parfois, le pas peut sembler très petit par rapport à ces grands enjeux, mais il est très essentiel que la recherche et les autorités continuent de travailler ensemble pour relever ces défis», conclut Arno Biwer.
Laura Bannier