Utiliser l’expertise de la technologie de l’IA pour résoudre le problème de la faim dans le monde: c’est l’objectif que s’est fixé le partenariat entre le gouvernement luxembourgeois, le Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM), le Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) et le CERN (centre européen pour la recherche nucléaire).
Source : virgule.lu
Date de publication : 19/10/2024
Lancé officiellement le 15 octobre, ce partenariat stratégique, qui s’écoule sur une période de deux ans, est financé à hauteur de deux millions d’euros par le gouvernement luxembourgeois dans le cadre de la stratégie de coopération au développement du pays et des efforts d’aide humanitaire d’urgence.
L’objectif est d’«encourager les technologies de pointe pour accélérer les progrès vers un monde sans faim et renforcer l’action humanitaire dans le monde entier», selon le ministre de la Coopération, Xavier Bettel (DP).
Utilisation conjointe des IA du CERN et du LIST
Plus précisément, les algorithmes d’IA du CERN pour la modélisation et les prévisions météorologiques seront utilisés conjointement avec l’IA du LIST pour l’observation de la Terre et la modélisation des récoltes afin d’amplifier l’impact du PAM en améliorant l’efficacité de ses interventions d’urgence et de ses activités de développement.
«Cette collaboration nous permet de tirer parti de l’IA responsable pour transformer nos opérations sur le terrain, en fournissant aux bureaux de pays des outils de pointe pour prendre des décisions fondées sur des données en temps réel», explique la directrice exécutive adjointe pour les partenariats et l’innovation au PAM, Rania Dagash-Kamara.
«En intégrant l’engagement du Luxembourg en faveur de l’innovation, l’expertise technologique du CERN et les capacités d’observation de la Terre du LIST, nous établissons une nouvelle norme pour la réponse humanitaire qui peut sauver des vies et renforcer la sécurité alimentaire des communautés en crise.»
Faciliter la prise de décision en cas de catastrophe
En pratique, le partenariat permettra d’étendre et de renforcer une plateforme du PAM nommée SKAI, un outil développé avec Google Research qui utilise l’IA et l’imagerie satellitaire pour permettre des aperçus en temps réel et des renseignements exploitables pour une prise de décision efficace lors d’une intervention en cas de catastrophe.
«Le LIST apporte son expertise reconnue dans l’intégration des données d’observation de la Terre avec des données mesurées in situ, des modèles de surface terrestre et des services de communication satellitaires et terrestres afin de fournir des outils d’aide à la décision fondés sur des preuves en temps quasi réel», explique le directeur scientifique du LIST, Lucien Hoffmann.
Éviter les abus en matière de transfert d’argent
Les applications du partenariat peuvent être très diverses. Ainsi, l’une d’entre elles consiste à éviter les abus en matière de transfert d’argent. De fait, le PAM envoie de l’argent aux personnes dans le besoin pour leur éviter d’avoir à faire des compromis impossibles, comme décider de manger moins pour pouvoir garder leurs enfants à l’école. Des transferts monétaires qui représentent 35% de l’ensemble de l’aide du PAM, ce qui fait de ce dernier le plus grand fournisseur d’argent humanitaire au monde.
Il s’agit donc d’adapter les algorithmes de détection d’anomalies du CERN - utilisés pour le contrôle et l’analyse des données relevant de la physique - au système de transferts monétaires du PAM, ce qui pourrait constituer un outil de détection précoce des abus en matière de transferts d’argent.
282 millions de personnes confrontées à la faim
Des améliorations qui ont plus que jamais leur utilité. Le nombre de personnes menacées par la faim dans le monde n’a en effet jamais été aussi élevé: en 2023, 282 millions de personnes réparties dans 59 pays étaient confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, soit 24 millions de plus que l’année précédente, selon le rapport mondial sur les crises alimentaires publié le 24 avril 2024.
Parmi eux, plus de 705.000 personnes se trouvaient dans une situation d’insécurité alimentaire catastrophique et risquaient de mourir de faim - un chiffre record. La bande de Gaza regroupe actuellement 80 % des personnes confrontées à une menace de famine imminente, avec le Soudan du Sud, le Burkina Faso, la Somalie et le Mali. L’intensification des conflits et de l’insécurité, l’impact des chocs économiques et les effets des phénomènes climatiques extrêmes sont les principaux facteurs de la crise alimentaire.
Pierre Pailler